Quand les mots se retirent d’eux-mêmes
pour laisser place à la lumière
par Bernard Perroy
Philippe Mac Leod nous attire et nous surprend. Il nous décrit le monde, et particulièrement les paysages pyrénéens qui l’entourent, avec une grande simplicité, mais dans un regard contemplatif qui traverse toute chose, ou plutôt l’accueille, à la lumière de ce qui nous dépasse et qui pourtant fonde tout élan humain…
« Fraîcheur première »
Ses descriptions sont à la fois réalistes, remplies de détails et de saveur, s’attardant sur une branche, un soleil, un bruit d’eau… et dans le même temps, ce sont des “descriptions-supports” pour entrer dans la limpidité d’un monde “autre”, d’un paysage intérieur, d’un “invisible” qui sous-tend le “visible”… Mais rien d’introspectif, aucune pesanteur ou rationalisation… Bien plutôt des “faits” d’expérience, avec la légèreté de quelqu’un qui pratique l’émerveillement, écartant le voile des apparences pour nous faire pressentir la profondeur du réel en ses mille et une choses dont il ne faut « jamais perdre le contact fragile avec leur fraîcheur première. » (in “L’infini en toute vie”, éd. Ad Solem, 2008).
« Tout est en toi »
Chez Philippe Mac Leod, il y a toujours – volontairement ou non – ce double jeu, cette réciprocité entre “intériorité” et “extériorité”, entre le fait de scruter des « platanes le long du canal, hauts dans la lumière vive, et nus sur l’azur » à qui l’auteur confie : « Je vous aime, frères élancés, sous l’écorce de vos âges légers sur l’eau, fermes en la terre mais tout entiers pour le ciel » (in “Le pacte de lumière”, éd. Le Castor Astral, 2007), et le fait de préciser : « Tout est en toi, c’est de ton cœur le plus profond que la lumière surgira » (in “L’infini en toute vie”), ou encore : « Que cherchons-nous, sinon ce que déjà nous portons ? » (idem).
« Cette soif des commencements »
Oui, il y a de la ténacité chez Philippe Mac Leod à nous livrer toujours le même message, en contrepoint de beaucoup d’autres œuvres contemporaines : un message de vie, d’espérance, de lumière… Mais ne nous y trompons pas : derrière cette apparente tranquillité, cette vie d’ermite qui est celle du poète, derrière ce ferment de “Sagesse” que peuvent contenir ses mots, il y a d’abord et toujours un élan brûlant, une recherche, une faim… « Nous sommes toujours en route, je ne puis me concevoir qu’en marche » écrit-il dans “L’infini en toute vie” et un peu plus loin : « Le chemin s’invente » (idem). Ce marcheur, au sens propre comme au figuré, insiste en nous confiant : « Nous n’aurons pas d’autre gage, que cette soif des commencements » (idem).
Un pèlerinage du coeur
Page après page, il s’agit dans le fond d’un pèlerinage, autant avec les pieds qu’avec le coeur. Une marche délectable pour le lecteur de ces textes poétiques dont le style se met au service d’un émoi simple et si pur quand l’auteur admire ce « paysage craquelé comme un vieux tableau, tissé de brume et d’une lumière si blanche » que Philippe Mac Leod se demande : « Passerons-nous au travers ?»
Nous aurions envie de nous attarder en compagnie de ces pages qui respirent le jour, la nuit, les vignes, les saisons, la vallée, le ruisseau, les petits matins, les arbres, la montagne… jusqu’à sentir parfois combien, « au clair de l’hiver, chaque feuille brûle d’une clarté secrète et rayonne autour d’elle comme un jour cousu de transparence »…
Bernard Perroy
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éléments de bibliographie :
- Habiter les mots (Ad Solem, 2016)
- Le Vif, le Pur (Le Passeur, 2013)
- Le pacte de lumière (Le Castor Astral, 2007)
- Sagesses (Ad Solem, 2001)
“Béatitudes” de Pierre Deuse – photo © D. Lefevre
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