Influences – Confluences
(Les mille et une courbes d’une vie en poésie)
Premières influences…
Bernard Perroy est né à Nantes, en 1960 et vit actuellement en Sologne. Séduit très tôt par le monde des mots et de la poésie, depuis l’école puis le lycée, son itinéraire rencontre tout un temps le surréalisme, à partir de ce jour où un ami du lycée, Serge Nouailhat (actuellement peintre et maître verrier), lui tend un petit livre, “La vie immédiate” de Paul Éluard… Mais il aime également les poètes espagnols et latino-américains, et pêle-mêle : Saint-John Perse, Senghor, Supervielle, Schehadé, Leiris, Follain, Guillevic, Max Jacob, Victor Segalen, Frénaud, Bonnefoy, Dupin, Roubaud, Reda, Jacottet, Rilke, Ungaretti et bien d’autres… « Je me souviens avoir lu avec passion durant les années 80, l’œuvre complète de Reverdy, Michaux, Joë Bousquet, René Char… » confie le poète. Bernard Perroy étudia la philosophie à Rennes avant d’exercer sur Nantes son métier de kinésithérapeute. La musique est également pour lui un domaine important et les collaborations en poésie commencèrent…
Sculpture sur verre (détail), 2005 © Serge Nouailhat
Ni dualisme, ni amalgame
En 1988, Bernard Perroy est reçu dans une anthologie de 80 poètes de Loire-Atlantique (“Sur la page où naissent les mondes”, de Christian Bulting). Cette même année, après une existence “mouvementée”, il entre à 28 ans dans une communauté religieuse où il prononcera ses vœux perpétuels en 1994, devenant Frère Bernard. Après une interruption de quelques années, il reprend son activité poétique qu’il distingue de ses écrits plus directement spirituels (rédacteur au mensuel “Feu et Lumière”, participation à des anthologies de spiritualité, méditations…) «Je fus invité à faire cette distinction par le poète suisse Anne Perrier, mais de nombreux ponts se conçoivent entre ces deux domaines. » Cet éclectique aime établir des ouvertures, des “traits d’union”, multipliant les échanges ou collaborations avec des poètes, des peintres, des musiciens d’horizons culturels, religieux ou artistiques très divers.
C’est également en 1994 qu’il fait la connaissance de Gilles Baudry, poète et moine bénédictin de Landévennec (publié aux éditions Rougerie). (Voir au sujet de Gilles Baudry, un article de Bernard Perroy réalisé pour la revue “Friches” et reporté dans ce blog à la catégorie des articles “Arrêt sur…”). Gilles Baudry l’aidera à vivre d’une façon unifiée ces deux domaines distincts de la prière et de la poésie. « Ni dualisme, ni amalgame » selon les mots de Gilles Baudry. Bernard Perroy affirme : «Frères à double titre, en religion comme en poésie, notre amitié ne fit que s’approfondir… » Gilles Baudry, qui connut Michel Manoll, sera pour Bernard Perroy un élément déclenchant pour s’approcher des poètes de “L’École de Rochefort” (mais aussi de bien d’autres) et entrer en amitié ou en correspondance avec : Hélène Cadou, Serge Wellens, Jean-Michel Fossey, Jean-Pierre Lemaire, Sylvie Reff, Gérard Pfister, Josette Ségura, Christiane Keller, Gérard Bocholier, Alain Suied, Pierre Dhainaut…
« Bibliothèque » © Hanna Sidorowicz
Sa double vocation le conduit à lire des auteurs volontairement ignorés de lui jusque-là. Il se plonge alors dans Péguy, Claudel, Patrice de La Tour du Pin, Pierre Emmanuel, Jean de la Croix, Émilie Dickinson, Marie-Noël… Il aimait depuis longtemps Christian Bobin, mais c’est grâce à Gilles Baudry qu’il a osé s’aventurer dans la lecture de poètes chrétiens, depuis les “classiques” précités jusqu’aux contemporains comme Jean Grosjean, Jean-Claude Renard, Jean-Pierre Jossua, Jean-Yves Masson, Jean Lavoué, Philippe Mac Leod, Jean Bastaire, Cristina Campo, François Cassingena-Trévedy ou encore Jean Mambrino pour lequel il a collaboré à un ouvrage collectif (aux éd. Cahiers Bleus)… Ces chrétiens sont avant tout des poètes de grande valeur qui ne sont plus à présenter… »
De la Loire au bassin méditerranéen…
En 2002, il est proposé fortuitement à Bernard Perroy d’aller vivre près de Rochefort-sur-Loire, lieu emblématique de la naissance de cette “École” du même nom dont René Guy Cadou fut l’une des figures de proue… D’autres amitiés voient le jour comme avec la poète Josyane de Jésus Bergey ou Nathalie Billecocq (et son blog : La Lucarne ovale), toutes deux passionnées par la poésie et l’art plastique de leurs frères Nord Africains ; avec Jacques Gauthier, canadien, théologien, écrivain, conférencier et poète ; ou avec Jean-Marie Gilory, Jean-Claude Albert Coiffard (et toute l’équipe des éditions Sac à Mots) d’où naîtra son recueil “Un soir où le soleil d’octobre…” (éd. Sac à Mots, 2005). Et les rencontres se multiplient… « Je me souviens de la première fois où je vis Rachid Koraïchi, en 1997. Homme généreux, homme d’unité, de rapprochement, Rachid est un plasticien algérien, d’origine soufie. Il vit actuellement à Paris. C’est vraiment un homme de coeur…» Koraïchi expose depuis 1970 dans différents musées et fondations à travers le monde. Il a travaillé entre autres sur le témoignage des 7 moines de Thibirine, sur l’œuvre de Rûmi, et collabora avec de nombreux écrivains et poètes comme Sylvie Germain, Michel Butor, Nancy Huston, Salah Stétié… De cette amitié naîtront deux œuvres communes, “Cœur à cœur” (éd. Al Manar, 2006) et « Une gorgée d’azur« (éd. Al Manar, 2011) accompagnés chaque fois de 49 encres de Rachid Koraïchi. Bernard Perroy eut l’occasion également de collaborer ponctuellement avec des artistes comme la peintre Pascale Nouailhat, la sculptrice Catherine Carré, les photographes Dominique Lefevre ou Catherine Deher, le pianiste Nicolas Celoro…
Alain Gorius, l’éditeur de Al Manar, donna l’occasion à Bernard Perroy d’élargir son champ de vision sur la poésie contemporaine du bassin méditerranéen, comme avec Abdellatif Laâbi, Georgia Makhlouf, Anne Rothschild, Tahar Bekri… Bernard Perroy aime l’œuvre de la poète juive Rachel qu’il a pu connaître par la rencontre de Bernard Grasset, un poète de La Roche-sur-Yon qui en fut le traducteur (chez Arfuyen) ainsi que l’oeuvre du diplomate libanais Salah Stétié, ou encore celle de Nadia Tuéni. Un ami tailleur de pierre, Jean-Loup Hanquart, lui a fait connaître l’œuvre du poète palestinien Mahmoud Darwish…
Anafora (Égypte), 2007 © Cath. Deher
Diamant à mille facettes…
Si l’on demande à Bernard Perroy ses préférences, il répond tout de suite : « Trop difficile ! Il y en a tant et tant qui me parlent par l’un ou l’autre de leur aspect… Un diamant à mille facettes ! » Outre les poètes précités, il aime l’œuvre de François Cheng à la croisée des chemins entre la Chine et l’Occident, ou la profondeur et la simplicité de l’œuvre d’Andrée Chedid, ou le désir incandescent d’un André Velter, ainsi que cette poésie qui exprime cet “extraordinaire du quotidien” comme le font merveilleusement Robert Momeux, Georges Bonnet, Jean-Vincent Verdonnet, Pierre Dhainaut, Gilles Baudry, Jean-Pierre Lemaire… Il évoquera aussi facilement Meschonnic, Pierre Gabriel, Claudio Rodriguez, Charles Juliet, Nicolas Dieterlé et la beauté vivifiante de leur écriture et de leur questionnement… ou encore Lorand Gaspar, Tahar Ben Jalloun, Gamoneda, Michel Cosem, J.-P. Farine, Jean-Michel Fossey (et sa revue Hors-Jeu), Nathalie Nabert, Isabelle Solari, Paul Guillon (tous les trois édités chez Ad Solem), ou encore des poètes aussi opposés que Jean-Pierre Boulic et Xavier Grall, mais tous les deux bretons et chercheurs de sens, ainsi que l’ouverture d’un Jean-Luc Maxence dont les Cahiers du Sens et les éditions du Nouvel Athanor répertorient des poètes connus ou inconnus, qui sortent bien souvent des “créneaux” officiels…
« Au Marché de la Poésie de Rochefort, nous confie Bernard Perroy, j’ai pu apprécier ces rencontres improvisées, ces partages de paroles et d’ouvrages avec des poètes comme Jacques Ancet, Joël Bastard, Erwann Rougé, Jean Hourlier (qui s’occupe admirablement de la collection de poésie des éditions du “Petit Pavé »), le poète turc Seyhmus Dagtekin, James Sacré, Alain Richer, Cécile Odartchenko (et ses éditions des Vanneaux) et bien d’autres… Même s’il s’agit d’être seul pour la lire, pour l’écrire, la poésie est aussi pour moi le lieu privilégié de rencontres, d’amitiés vraies et durables, de découvertes et d’élargissement du cœur, même s’il faut ensuite se “ramasser” de nouveau, se “rassembler” en soi-même après avoir tout oublié des lectures ou des rencontres, et ouvrir les oreilles ou les yeux – les vrais tout comme ceux du cœur ! – pour poursuivre le chemin, beau et dépouillant à la fois, de l’écriture… On “fait” avec ce que l’on est, avec son histoire, avec ce que l’on vit… Et l’on est toujours en chemin…» Bernard Perroy en rend compte dans ses ouvrages comme « Si nous savions vraiment…« (éd. La Porte, mai 2011) qu’il dédie à Pierre Dhainaut et Yves Perrine, ou dans « Petit livre d’impatience » préfacé par Pierre Dhainaut (éd. du Petit Pavé, 2011) ou encore par cette « traversée » de la vie et ces « mots jetés sur l’établi du temps » que l’on retrouvent dans « Sur la plus haute branche » (éd. Sac à Mots, déc 2011), « La nuit comme le jour » préfacé par Gérard Pfister (éd. Le Nouvel Athanor, mai 2012), « Une joie tremblante » préfacé par Jean-Pierre Lemaire (éd. Ad Solem, mai 2012), « Cahier d’un soir d’été » (éd. La Porte, Janv 2013)…
« Forêt silencieuse… », 2009 © Nathalie Billecocq
En attente…
- « En tout lieu… » serait le fruit des différents voyages que Bernard Perroy a pu réaliser (en privé ou comme rédacteur au mensuel “Feu et Lumière”), se nourrissant d’images, de visages, d’horizons, d’impressions : Égypte, Irlande, Roumanie, Grèce, Hollande, Danemark, Éthiopie, Angleterre, Espagne, Belgique, Allemagne, Pologne, Liban… Ce recueil voudrait rassembler les témoignages de ces instants éparpillés géographiquement, tout en relevant les “constantes” que l’on trouve finalement en tout homme, d’où qu’il soit…
- « Miroir pour l’arbre » ; duo peintures – textes, qui s’est construit au fil du temps, chaque fois que Bernard Perroy découvrait un nouveau tableau de Nathalie Billecocq qu’il « commentait » à sa façon : ainsi toute une série se trouve en « réserve » (dont une part fut l’objet d’expositions) et en attente de trouver éditeur…
Toutes ces choses viendront en leur temps ! Car selon les mots mêmes de Bernard Perroy : « La poésie n’a jamais été une affaire d’urgence, ou du moins, s’il y en a une, c’est celle d’une qualité de présence, d’une fraternité, d’une gratuité, d’un rendez-vous avec un autre temps plus intérieur, mais sans aucun doute vital pour chacun et pour tous, ensemble »…
série « Toughra à la trace », 2003 © Hamid Tibouchi
*
Je suis quelqu’un pour qui les pas, les mots et les images entretiennent beaucoup de relations.
Je viens de vous découvrir grâce à Poezibao… merci à tous les deux !
De ce pas je me jette sur votre site…
Bien à vous . BQ.
Cher Bernard,
J’ai parcouru ton blog ce soir et je suis étonnée par sa richesse, son foisonnement ! Il va falloir plusieurs visites pour le parcourir en entier. Mais déjà ce qui m’interpelle en premier ce sont les oeuvres d’art que tu as choisi pour illustrer tes propos. Magnifique ! Et j’aime particulièrement le détail de la sculpture sur verre. Ça pourrait m’inspirer pour un tableau avec ce bleu incroyable…
Quant à ta poésie, elle est aussi simple et limpide que profonde et touchante. Il me faut la lire et la relire, m’en imprégner, ça va prendre un peu de temps mais elle demande à y retourner, elle appelle, elle aimante, elle nous fait aimer la vie, et ses petits moments précieux que tu mets si bien en valeur. Magique !!
Bravo à toi, merci de ta confiance pour m’avoir donné ton blog, je te découvre et t’apprécie encore davantage. Tu es une très belle personne et j’espère que tu le sais !
A très bientôt bien sûr, en réel ou à travers ton blog.
Marie